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Aujourd’hui le Web fait partie intégrante de notre quotidien. Avec 5 milliards d’utilisateurs dans le monde et presque 500 000 nouveaux utilisateurs par jour1 Données pour l’année 2022 (url : https://datareportal.com/global-digital-overview), le Web arrive en tête des supports les plus consultés et le plus utilisé. Le développement de la mondialisatio post-Seconde Guerre mondiale a nécessité des transferts de marchandises donc de données toujours plus importantes, plus rapides, sur de distances toujours plus grandes, et c’est dans ce nouvel écosystème que le papier semble avoir montré ses limites. À noter que dans cette recherche, le terme de Web sera employé au lieu de son équivalent français toile, nous nous permettrons cet anglicisme puisqu’il est utilisé et largement compris par un public francophone, et pour éviter tout risque de confusion entre toile et réseau.
C’est donc dans cette continuité, voire dans cette évolution du support papier comme support de données, que le Web est apparu. Dans ses premières formes, le « proto-Web2 Par « proto-Web » j’entends ici les premières versions des navigateurs Web. » s’est beaucoup inspiré des codes visuels de l’imprimé pour se construire, pour ensuite se développer et créer son propre langage visuel et sa propre culture dans un écosystème numérique tel que nous le connaissons aujourd’hui. En partant du postulat que le monde de l’édition imprimée, les codes, les habitudes qui ont modelé la façon dont un texte est mis en page, ont influencé le Web à ses débuts, pourrions-nous imaginer que le Web revienne enrichir la publication imprimée maintenant qu’il est devenu un médium à part entière ? Au-delà d’une influence purement esthétique, qui ne se reposerait que sur les variations visuelles qu’à apporté le Web, est-ce que ce dernier pourrait nourrir l’imprimé dans ses moyens de production et dans son rapport aux contenus libres ? Si un tel enrichissement est possible, de quelles façons, et dans quelles mesures, le Web pourrait-il influencer la publication imprimée ?
C’est le 29 septembre 1954 que le CERN (Conseil Européen de Recherche sur le Nucléaire) est fondé par douze États membres de l’Union Européenne. L’objectif principal de cette initiative est de créer un laboratoire international pour faire avancer la recherche fondamentale. Il est implanté à la frontière Franco-Suisse dans la commune de Meyrin, proche de Genève. Les expériences qui sont menées au CERN sont principalement concentrées sur différents accélérateurs de particules, elles nécessitent donc un parc de serveurs de stockage conséquent pour pouvoir enregistrer les nombreuses données mais également un réseau informatique performant pour pouvoir envoyer ces données à travers tout le centre de recherche le plus efficacement possible. C’est dans cette atmosphère de recherche et d’innovation que le Web va pouvoir prendre ses racines.
Bien que le CERN soit un très grand centre de recherche, la majeure partie des scientifiques qui y participent n’y sont pas localisés. Ils étudient et planifient leurs expériences de recherche à distance, depuis des universités ou des centres de recherches situées dans leur pays respectifs. Assez vite le problème de la transmission de données informatiques apparaît, comment permettre un accès rapide à la base de données par tous les associés du centre de recherche ? Il est donc nécessaire de mettre au point un système de partage à distance. Ce système doit être assez fiable et stable pour pouvoir gérer le nombre important d’utilisateurs que représente la communauté scientifique du CERN. Il doit aussi être assez performant pour pouvoir traiter les grandes quantités de données que le centre produit.
Un scientifique britannique qui travaillait au CERN, Tim Berners-Lee, va alors se pencher sur cette question. C’est en mars 1989 qu’il propose les premiers concepts (fig.1) de ce qui deviendra par la suite le World Wide Web que l’on connaît aujourd’hui. Fin 1990, Berners-Lee rend opérationnel le premier navigateur Web. Dans sa version primitive, le Web de Tim Berners-Lee permettait un accès rudimentaire à des documents internes pour les scientifiques du CERN. Il sera développé et étendu pour permettre un accès à différentes données du centre de recherche. Cette première version permettait déjà l’exploitation des liens hypertexte, technologie qui a pu prendre son plein essor grâce au Web, et que nous détaillerons plus tard dans le développement.
Une précision importante à apporter est que le Web est à différencier de l'Internet. L’Internet est un espace physique dans lequel le Web évolue. Pour résumer ça plus simplement, l’Internet est le réseau physique, constitué de câbles, de serveurs et d’antennes qui nous permet d’accéder au Web. Aussi, il ne faut pas confondre Numérique et Web, le numérique étant l’ensemble des outils et supports qui sont utilisés pour concevoir et explorer le Web.
En parallèle du développement du Web, la démocratisation de l’ordinateur et de l’Internet commence également à s’accélérer. De plus en plus de foyers peuvent se procurer un ordinateur et le 30 avril 1993, le WorldWideWeb passe dans le domaine public. De nouveaux navigateurs Web commencent à apparaître pour concurrencer l’unique navigateur disponible à ce moment : le WorldWideWeb3 Crée par Tim Berners-Lee en 1990, ce fût le premier navigateur permettant d’accéder à des sites Web. Il a cependant rapidement perdu en popularité en raison du fait qu’il ne fonctionnait que sur des ordinateurs NeXT, machines rares à cette époque.. En particulier le navigateur Mosaïc, développé de l’autre côté de l’Atlantique par le NCSA4National Center for Supercomputing Application, qui fut le premier à pouvoir afficher des images. Ces nouveaux navigateurs démocratisent l’utilisation d’Internet dans les foyers, ce qui entraîne un changement démographique sur le Web. Jusque là très scientifique, le réseau d’utilisateurs qui compose le Web devient plus varié, bien que son public soit dans ses débuts majoritairement composé de passionnés d’informatique, un public de plus en plus large se voit offrir la possibilité d’accéder au Web et à ses services. C’est également à cette période que l’on voit apparaître les premiers chats IRC5 Internet Relay Chat, en français « discussion relayée par Internet », est un protocole de communication textuelle sur Internet. Il sert à la communication instantanée sous la forme de discussion de groupe par l’intermédiaire de canaux de discussion. et les premiers forums de discussion. Le développement des interfaces graphiques facilite aussi grandement l’accès à ces technologies et ces services, là où avant l’apparition de ces interfaces, les utilisateurs devaient interagir avec des interfaces en ligne de commandes, beaucoup moins évidentes à prendre en main.
À l’apparition du Web, la mise en page des sites était rudimentaire, pendant une période, le seul langage disponible pour concevoir un site était l’HTML6 Hyper Tex Markup Language est le code utilisé pour gérer la structure d’une page Web et de son contenu. , les possibilités de mise en page étaient alors relativement limitées.
C’est en 1996 que le CSS7 Cascading Style Sheets ou Feuilles de style en cascade est un langage qui permet de contrôler la mise en forme de documents HTML apparaît pour la première fois, il permet une plus grande flexibilité dans la mise en page, et deviendra à partir des années 2000 un incontournable dans la conception de sites Web. Cependant, la structure d’une page de site Web se conforme aux codes de mise en page d’un document imprimé. En laissant des marges sur les côtés pour composer le contenu dans la zone centrale de l’écran, on constate que la construction des sites se rapproche plus d’un format à la française, là où les écrans, carrés ou rectangulaires en format paysage offraient de nouvelles possibilités de mise en page, instinctivement les premiers webmaster ont privilégié une mise en page similaire aux documents imprimés, en affichant une unique page, laissant de côté les possibilités qu’offrait le format de l’écran.
Au fil du développement du Web, le nombre de sites s’est accru de façon quasi-exponentielle8 Internet Live Stats, 2018 (https://www.internetlivestats.com/total-number-of-websites/). Cette effervescence et l’affluence de contenu ont entraîné l’apparition de nouvelles problématiques et ont soulevé certaines questions, dont une particulièrement : « Comment faire pour que les utilisateurs du Web préfèrent consulter mon site plutôt que le site de la concurrence ? ». C’est face à ces nouvelles problématiques que les webmasters de sites internet ont commencé à se poser des questions relatives aux nouvelles façons dont il était possible de proposer du contenu sur le Web. C’est également à ce moment charnière que les questions d'ergonomie d’usage et d’UI / UX9 UI (User Interface) et UX (User eXperience) sont deux métiers qui sont apparus avec le Web. Le premier se charge de l’intégralité des éléments graphiques d’un site Web, le second réfléchit à la façon dont l’utilisateur va explorer le site, et tend à essayer de rendre cette exploration plus fluide. ont commencé à être questionnées dans une volonté de rendre un site plus agréable au visiteur.
Lors de l’apparition du Web, l’ordinateur est déjà bien développé en tant qu’outil et les logiciels de Publication Assistée par Ordinateur10 Publication Assistée par Ordinateur (PAO), programme facilitant la création de contenu graphique à l’aide d’un ordinateur. ont déjà commencé à apparaître sur le marché depuis 1985. Cependant avec cette apparition soudaine des outils d’aide à la PAO, la production traditionnelle dans le milieu de l’édition semble être bousculée. Avancé par un argument du « tout numérique » qui viendrait éradiquer le papier des espaces de travail, certains acteurs du monde de l’édition semblent peu convaincus par cette nouvelle technologie qui, d’un côté facilite le travail des typographes, maquettistes, graphistes, mais semble aussi les enfermer dans un cadre de création plus limité qu’à l’accoutumé. Apparaît alors un clivage très marqué entre les deux approches de la conception de supports imprimés, d’un côté, la conception « traditionnelle » avec les outils de photo-composition et de mise en page analogique, et de l’autre, la conception « moderne » exploitant les nouvelles possibilités offertes par l’outil numérique.
Mais cette vision doit être contrastée, le numérique n’a jamais eu comme réelle vocation de remplacer totalement l’utilisation du papier, il était plutôt question d’en réduire l’usage. L’idée d’un monde « sans papier » viendrait en réalité plutôt d’une propagande marketing ayant comme objectif de simplement vendre ces nouvelles technologies en promettant une nouvelle façon de travailler, plus facile11 LUDOVICO Alessandro, « La mort du papier (qui n’a jamais eu lieu) », in Post-Digital Print : La mutation de l’édition depuis 1894, 2012, traduit de l’anglais par Marie-Mathilde Bortolotti, Paris, B42, 2016, p.28. Promouvoir un « idéal » où le papier n’aurait plus sa place et où l’Homme dépourvu de papier serait libéré de ces piles de feuilles volantes impossibles à ranger, demeure plutôt de l’utopie. En réalité, le papier est indissociable du numérique, il a même été observé que l’utilisation du papier a augmenté après l’arrivée de l’informatique puisque le papier, contrairement au numérique, possède cette capacité de pouvoir persister dans le temps. Il a donc été rapidement choisi pour archiver les données informatiques de façon permanente. De plus, il était difficile de changer un système administratif très ancré dans ses habitudes.
En plus de cela, certains types d’interaction que propose le papier demeurent difficiles à reproduire dans un espace numérique. Griffonner, annoter, plier, déchirer, sont des actions propres au papier et qu’il est compliqué voire impossible à reproduire ou simuler sur un écran numérique. L’apparition des tablettes et des appareils tactiles ou qui nécessitent l’usage d’un stylet on permis le développement de ce type d’usage, mais ces ajouts sont parfois limités au support sur lequel elles sont produites, rencontrant des problèmes de compatibilité entre les différents logiciel et systèmes d’exploitations. Le papier permet un ajout instantané et un partage du document de main à main plus simple.
Nous pouvons donc dire que le papier et les outils numériques ne sont pas concurrents dans leur forme, ils présentent chacun des particularités. Ces particularités leur donnent des avantages et inconvénients qui leur permettent de répondre à différents types d’usages.
À l’instar des outils de PAO qui semblaient beaucoup plus rigides dans les possibilités de création offertes qu’avec des outils de production analogiques de conception éditoriale, le Web semble, à première vue, offrir moins de possibilités pour produire de la mise en page de sites Web. Construite autour du code, l'approche de la mise en page Web est plus structurelle, là où des règles générales doivent pouvoir s’appliquer à l’intégralité du site. La forme du code est aussi plus hermétique à une approche créative, là où l’aspect brut du texte balisé peut être plus facilement repoussant pour un designer habitué aux interfaces WYSIWYG12 « WYSIWYG » est l’acronyme de « What You See Is What You Get », signifiant littéralement en français « ce que vous voyez est ce que vous obtenez ». Le WYSIWYG désigne en informatique une interface utilisateur qui permet de composer visuellement le résultat voulu, typiquement pour un logiciel de mise en page, un traitement de texte ou d’image. Comme l’indique Julie Blanc, designer graphique et développeuse CSS13 BLANC Julie, « Si Jan Tchichold avait connu les feuilles de style en cascade, plaidoyer pour une mise en page comme programme », dans Sacks, Kim, Guégan, Victor (dir.), Systèmes : logiques, graphies, matérialités , Revue Design Arts Medias , 09/2022, (consulté le 21/09/2022), (https://journal.dampress.org/issues/systemes-logiques-graphies-materialites/si-jan-tschichold-avait-connu-les-feuilles-de-style-en-cascade-plaidoyer-pour-une-mise-en-page-comme-programme), la programmation Web souffre d’une image négative d’une supposée incompatibilité entre la pratique du code et la sensibilité qu’un designer doit pouvoir réussir à exprimer dans une mise en page. Là où dans la mise en page traditionnelle créer le lien entre le fond et la forme est primordial, le Web imposerait cette séparation entre fond et forme d’un point de vue technique.
Cette « rigidité » que le code impose n’est cependant pas toujours une contrainte, et le designer doit pouvoir apprendre à maîtriser les avantages qu’offre le CSS à la conception de pages. Dans la composition traditionnelle de documents imprimés, le travail du typographe était de fournir un ensemble de règles régissant l’ouvrage à l’imprimeur. Dans le cas du CSS, c’est ce dernier qui se charge d’envoyer ces règles de composition au navigateur Web, qui les interprète et les applique au document HTML associé, permettant d’afficher notre page Web avec le style souhaité. Bien entendu c’est le designer qui se charge de définir ces règles, l’avantage étant qu’il peut avoir un retour visuel instantané sur comment les règles vont interagir entre elles et transformer le document.
Un des avantages du CSS est qu’il permet d’appliquer un même style à tous les éléments similaires d’une page web, comme par exemple, tous les sous-titres d'une page. Cette particularité permet de pouvoir contrôler l’aspect d’un document Web avec seulement quelques règles CSS, le navigateur se chargeant d’appliquer ces règles automatiquement à l’ensemble du document. Cela permet notamment au designer d’être soulagé de nombreux choix comme par exemple le positionnement d’images. Imaginons que dans un processus de mise en page papier le designer doive décider de la position d’une image et d’un texte sur une page, un grand nombre de fois dans l’ouvrage. À chaque nouvelle image, la taille de cette dernière et la longueur du texte associé nécessite une nouvelle réflexion dans la mise en page. Dans le cas du CSS, puisque le programme se charge de disposer automatiquement les éléments d’après les règles établies, le designer n’a plus à se soucier de devoir prendre ces décisions. Cependant il ne devient pas pour autant prisonnier du programme, il garde la possibilité d’ajouter des exceptions pour certains éléments s’il souhaite ajuster précisément la mise en page.
Un point que nous n’avons pas encore abordé est que le Web, outre proposer de nouvelles façons de concevoir la mise en page, permet également l’intégration de nouveaux supports pour afficher du contenu. L’intégration de supports animés (vidéos, gifs) dans des documents textes a pu voir le jour. Mais un des principaux avantages qu’offre le Web est sa capacité à être affichable sur différents supports. Au début uniquement consultable sur ordinateur, l’évolution des téléphones portables et en particulier l’apparition des smartphones a rendu possible la consultation de sites Web sur appareil mobile.
C’est pour cette raison que le Web est devenu responsive, c'est-à-dire qu’un document HTML, un site internet, a aujourd’hui la capacité de s’adapter au format d’écran du support sur lequel il est consulté. Que ce soit un format paysage comme sur un ordinateur, ou un format portrait comme sur un smartphone ou une tablette, les sites doivent aujourd’hui pouvoir s’adapter automatiquement à ces changements de support, et adapter leur apparence, voire leur fonctionnement en conséquence. Cette adaptabilité est une révolution en soi puisque jusque-là, un support de formats différents, dans l’édition papier, nécessitait une mise en page personnalisée faite à la main. Le développement du support Web a donc permis d’ouvrir de nouvelles possibilités pour les designers graphiques dans la création de mises en pages, bien que la conception par le code semble plus hermétique à première vue, elle permet autant, si ce n’est plus de possibilités que la mise en page print.
Avant l’apparition de la PAO, le processus de production d’un ouvrage papier était beaucoup plus long et fastidieux. D’après Conrad Taylor, typographe, dans son ouvrage Mais qu’est ce qu’ont bien pu nous apporter les systèmes WYSIWYG ?, l’inefficacité et la redondance du système était un des points noirs de la production à cette époque14 CONRAD Taylor, Mais qu’est ce qu’ont bien pu nous apporter les systèmes WYSIWYG ?, traduit de l’anglais par le CFTTR, Cahiers GUTenberg, n°27, 1997, p. 5-33. De plus, chaque étape de la production était un corps de métier à part entière (typographe, maquettiste, photocompositeur, imprimeur…) et nécessitait l’intervention d’un prestataire spécialisé15 LEVITT Briar, (2016), Graphics Means: A history of Graphic Design Production. C’est en 1985 que la société de logiciels Adobe Incorporated Software (aujourd’hui renommée Adobe Inc.) lance sur le marché son premier logiciel de PAO : PageMaker (fig.2). Cette entreprise sera leader sur le marché des logiciels de création numérique, elle introduira en 1989 son logiciel phare, Photoshop, logiciel de retouche d’image matricielle. Ce logiciel fut, entre autres, le premier logiciel qui permettait à des développeurs extérieurs d’intégrer des fonctionnalités supplémentaires à l’aide de plug-in16 NORR Henry R.. "Adobe Inc.". Encyclopedia Britannica, Oct 14 2022, consulté le 7 décembre 2022.(https://www.britannica.com/topic/Adobe-Systems-Incorporated).
Avec l’apparition de la Publication Assistée par Ordinateur, les différentes étapes du processus de production ont pu être fusionnées petit à petit et le métier de graphiste est devenu un poste polyvalent. Aujourd’hui, un graphiste s’occupe aussi bien de la composition, que de la typographie ou du traitement des images. Grâce à l’évolution rapide des outils informatiques, l’ordinateur qui n’était au départ qu'un simple outil parmi d'autres pour épauler le designer graphique dans sa création, est devenu l’outil central autour duquel gravite l’intégralité du processus de création. Comme l’explique Levitt Briar dans son reportage Graphic Means17 LEVITT Briar, Ibid, l’ordinateur est devenu le nouveau studio de travail portatif du graphiste nomade, où il peut exécuter rapidement et efficacement une grande variété de tâches. Mais cette condensation du processus de production en un unique individu est-elle sans faille ? Bien que l’ordinateur soit communément accepté comme étant un outil puissant, combiner autant de métiers en un seul est-il sans risques ?
Cependant les outils de PAO ne sont pas sans défauts. L’apparition des premiers logiciels WYSIWYG sur le marché a entraîné plusieurs problèmes qu’identifie Conrad Taylor. Lorsqu’un designer travaille avec des logiciels PAO, ce dernier est limité aux outils que le logiciel lui met à disposition. Dans une logique où n’importe qui pourrait proposer son logiciel de PAO, les différents logiciels doivent donc se démarquer par leur capacité à rendre le travail du designer le plus simple et le plus efficace possible. Ce travail d’efficacité passe en grande majorité par l’implémentation d’algorithmes qui prennent en charge certaines fonctions à la place du designer. Un des algorithmes qui affecte le plus le travail du designer sans pour autant que ce dernier ne s’en rende compte est l’algorithme qui s’occupe de gérer les blocs de texte, la césure, toutes les subtilités typographiques. Bien que dans certains logiciels comme InDesign où les réglages typographiques peuvent être ajustés plus précisément, bien qu’ils ne le soient pas toujours, dans d’autres il est souvent difficile de contrôler comment l’algorithme va agir sur notre texte. Les logiciels WYSIWYG relèvent alors presque davantage de boîtes noires algorithmiques que de véritables outils dont les designers peuvent s’emparer. Ces derniers sont alors contraints dans la création par ce que leur permettent les logiciels.
Revenons un instant sur le Web. À ses débuts, ce dernier avait une démographie composée majoritairement d’amateurs d'informatique, une approche DIY était alors très présente sur internet. Développer son propre site en partant de zéro était une pratique courante, les forums étaient un lieu d'entraide et de partage. De cette pratique est né un mouvement : l’Open Source. L'Open Source c’est le fait de mettre en libre accès le code source d’un logiciel, programme, script à d’autres utilisateurs et en autoriser la modification et la copie. Le modèle Open Source permet notamment à des logiciels gratuits de persister et de subir des mises à jour par des programmeurs volontaires qui décident de continuer à le développer. Cette initiative a permis de faire naître une multitude de logiciels gratuits, entretenus par leurs communautés, et a développé un très large réseau de défenseurs du Logiciel libre. Parmi tous les logiciels libres qui ont vu le jour, certains d’entre eux étaient des outils de création graphique comme Gimp, Paint.net et bien d’autres. Ces logiciels ont été pour beaucoup de nouveaux arrivants sur le Web, une porte d’entrée pour la création graphique, mais plus largement pour la création de contenu Web intégrant des supports iconographiques et vidéographiques.
Cette nouvelle vague de créateurs a permis l'essor d’un nouveau type de contenu. À cette période, la majorité du contenu était monopolisée par des canaux de diffusions qui devaient répondre à certaines règles de bienséance pour les lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs. La radio, la télévision, la presse papier, tout n’était pas possible sur ces médias. En revanche, la création de contenu sur le Web était, et est toujours, décomplexée vis-à-vis des sujets abordés. Cet espace de création libre a permis l’apparition de contenu plus controversé, familier et subversif que ce qu’il était possible de voir dans les canaux de distribution traditionnels. D’abord sous la forme de sites, de blogs ou de forums qui ont permis l’expression de nombreuses personnes et surtout la diffusion massive de cette expression personnelle, puis sous la forme vidéo, développée grâce à l’arrivée de Youtube en 2008 qui permis le partage massif de vidéo sur le Web, débloquant un nouveau média d’expression pour les utilisateurs. Toujours dans un esprit « fait maison » avec les moyens du bord. Similaire à l’apparition des fanzines entre les années 1970 - 1980, qui ont pu se multiplier en partie grâce au développement de la xérographie, technologie d’impression laser. Les fanzines étaient un lieu d’expression parallèle aux circuits de publication habituels. Exploités dans une dimension politique pour des contenus subversifs et décalés, ils furent le premier lieu d’expression alternatif pour de nombreux graphistes et artistes de cette époque.
Nous pourrions également tenter de comparer cette vague de création sur le Web avec l’apparition des radios pirates dans les années 60. Bien que ces dernières ne sont pas apparues grâce à une avancée technologique, nous pouvons y voir un mouvement de création et de diffusion qui s’oppose à la dogme de l’époque.
Il est alors possible d’essayer de dresser un parallèle entre l’apparition de ces mouvements de création, le fanzine « punk » et cette « culture Web », tous deux divergents de la norme de leur époque.
Le développement et la démocratisation du Web ont fait croître son nombre d’utilisateurs à une vitesse folle. Parallèlement, le nombre d’annonceurs publicitaires a également augmenté. La quantité de contenus produits par jour s’est donc diversifiée mais également densifiée. L’utilisateur a alors à sa disposition une pléthore de choix de contenus dans lequel se plonger, créant un nouveau problème pour les différents annonceurs ; Comment faire pour que l’utilisateur décide de choisir leur contenu plutôt qu’un autre ? La première tentative de solution à ce problème a été de proposer l’information le plus rapidement possible. Une stratégie qui est très visible dans la publication d’articles de presse. Le premier à publier une information remporte la bataille, quitte à parfois extrapoler l’information ou user de techniques discutables pour déclencher le clic de l’utilisateur18 Le Clickbait ou Piège à clic est une technique utilisée notamment dans le monde de la presse Web, qui consiste à utiliser un titre racoleur ou mensonger pour attirer le clic et générer des revenus publicitaires.
Mais, cette première solution semble avoir atteint ses limites. Aujourd’hui l’utilisateur est informé sur ces pratiques et ce type de stratégie semble un peu obsolète. Dans un article d’Adobe France datant de 201619 Adobe France, « La nouvelle ère du marketing de contenu : transformer les données en gourmandises numériques », 2016, en ligne, consulté le 22 novembre 2022 (https://blog.adobe.com/fr/publish/2016/09/20/la-nouvelle-ere-du-marketing-de-contenu-transformer-les-donnees-en-gourmandises-numeriques), l’auteur évoque la nouvelle stratégie mise en place par les acteurs de la publication Web. D’après cet article, la nouvelle voie pour alpaguer le lecteur serait de proposer un contenu plus qualitatif et plus court, des sortes de « gourmandises numériques ». En effet, d’après l’auteur, un contenu textuel long risque de lasser le lecteur qui peut à tout moment passer à une autre activité quasiment instantanément. Cette mode des « gourmandises numériques » s’est également développée dans le contenu vidéo, où les médias d’information 100% comme Konbini ou Brut on su se l’accaparer et en faire leur signature. Des reportages courts et qui vont à l’essentiel, voilà la solution pour capter le public habitué à une information condensée, presque limitée dans son nombre de caractères comme peut l’imposer certains réseaux tel que Twitter.
Notre façon de consulter du contenu Web a donc bel et bien changé au fil de l’évolution du Web, façonnée par des problématiques larges qui touchent à différents domaines. Tant sur des aspects techniques que sur des questions de lisibilité ou encore motivées par des problématiques monétaires, la publication Web s’est affinée pour atteindre sa forme actuelle. Elle est cependant encore tout à fait apte à évoluer vers une forme finale encore non définie.
Nous, utilisateurs du Web, sommes quotidiennement exposés à ces contenus et aux formes qu'ils prennent. Avons-nous alors une part de responsabilité dans la prolifération de ces nouvelles formes de communication ? En tant qu’utilisateurs, devons-nous partager uniquement du contenu qui nous semble être « correct » ? Dans cette effervescence de contenus et de formes, est-il possible d’éduquer à une « bonne » forme ? Et quelle serait la forme la plus adaptée au Web ? Le contenu qui adopte une forme condensée a certes l’avantage d’être plus digeste à la lecture et colle bien avec la tendance actuelle de la consommation rapide, mais cette sobriété dans le texte entraîne inévitablement des simplifications dans le contenu et un survol des sujets traités. Les « gourmandises numériques » ne sont alors peut-être pas la solution pour le moment.
L’un des aspects frappant qui apparaît quand on compare la publication imprimée et la publication Web, est que la seconde reste principalement une imitation de la première. En prenant l’exemple du site du journal Le Monde, les articles sont rédigés dans un corps de texte positionné au centre de l’écran, il y a un titre principal, des sous-titres qui séparent les différentes parties, l’usage de l’italique par endroits, mais au final assez peu d’éléments qui semblent réellement innover face au texte imprimé. Est-ce que le médium Web ne pourrait pas proposer de nouvelles façons de présenter du contenu textuel ? Malgré cela, certaines spécificités textuelles propres au Web se sont tout de même vues intégrées naturellement dans la publication Web. L’exemple le plus évident est celui du lien hypertexte, qui est devenu un incontournable dans les articles de presse et qui permet de renvoyer vers d’autres articles du même journal où à des sources utilisées par le rédacteur. Nous pouvons observer un exemple de cette utilisation sur un article publié par Le Monde (fig.3 - fig.3.2). Dans ce paragraphe, nous avons la possibilité de cliquer sur un lien qui va nous rediriger vers d'autres articles qui détaillent un point ou une actualité en lien avec l’article que nous étions en train de consulter. Certains médias intègrent également directement dans le corps du texte des éléments extérieurs au site, cette fonctionnalité est souvent utilisée pour citer des tweets de personnalités publiques. Il serait possible de penser que le site du Monde a conservé cette esthétique de journal papier pour ne pas dénoter avec sa publication imprimée ?
Mais en observant d’autres sites de publication, comme le Huff Post, anciennement Huffington Post, qui est un site web d’information actif depuis 2005, nous n’observons pas grande différence entre les deux sites. Le Huff Post adopte une mise en page similaire à celle du site du journal Le Monde, peut-être dans une volonté d’imiter ses pairs journalistiques, cependant malgré une présence 100% Web et sans équivalent imprimé, le Huff Post ne propose pas de mise en page qui dénote de ses concurrents pour ses articles journalistiques.
Cette intégration du lien hypertexte dans la publication presse a été mise en place dans une logique d’offre et de demande. Ce principe permet dans un premier temps de renvoyer vers des sources externes plus complètes, mais fut détourné dans un second temps pour envoyer les lecteurs sur d’autres articles du même site et ainsi prolonger sa présence. L’utilisation des liens hypertexte est donc stimulée par une habitude de référencement de l’information déjà présente dans la publication papier, mais aussi par une motivation économique puisqu’aujourd’hui la majorité des sites vivent en partie grâce à la publicité, un lecteur présent plus longtemps sur la plateforme engendre plus de revenu pour cette dernière. De plus, cette utilisation du lien hypertexte pour indiquer des sources ne peut être réellement considérée comme une innovation en soit puisque cette notion de renvoi vers une autre ouvrage, existait déjà dans l’édition papier et était représenté par la note de bas de page, ou par la bibliographie, qui pouvait renvoyer vers des sources plus complètes pour appuyer les propos de l’auteur. À l’unique différence que le lien hypertexte possède une dimension d’instantanéité ce qui peut facilement détourner le lecteur de l’objet principal. Dans un article du magazine Slate, le journaliste Michael Agger en s’appuyant sur le livre de l’écrivain Nicholas Carr, The Shallows: What the Internet is Doing to Our Brains20 CARR Nicholas, Internet rend-il bête ? Réapprendre à lire et à penser dans un monde fragmenté, Paris, Robert Laffont, 2011 démontre un lien entre la lecture analogique et numérique : « Un gros problème semble venir des hyperliens. Le fondement du Web agit comme un nid de poule dans une phrase. Un lien nous pousse à arrêter notre lecture et à évaluer le bien fondé d’un clic, ou pas, activant les zones de prise de décision de notre esprit. Les livres nous présentent un environnement plus passif, permettant à l’esprit de se concentrer sur les mots, au lieu de voir constamment ailleurs pour chercher s’il y en a de nouveaux, et peut-être meilleurs21 AGGER Michael, Je lis sur le Web donc je pense autrement, publié le 22 juin 2010, consulté le 11 décembre 2022, (http://www.slate.fr/story/23291/je-lis-sur-le-web-donc-je-pense-autrement). »
Ne serait-il pas possible d’exploiter autrement le support Web et toutes les technologies qu’il possède pour tenter de créer une nouvelle façon de lire de la publication ? Qu’en est-il des capacités responsives du Web ? La capacité à segmenter l’écran en différentes parties ? À afficher simultanément différents contenus. Une des forces du Web est de pouvoir s’afficher sur différents supports grâce à cet aspect responsive, dans notre cas d’un affichage textuel, cette technologie permet de changer certains paramètres du texte comme sa taille ou la largeur des paragraphes qui s’adaptent pour un meilleur confort de lecture sur le support concerné. Cependant la présentation du texte reste similaire à une version simplifiée de la mise en page imprimée, à la différence que cette dernière a souvent usage de colonne pour composer le texte, là où sur le Web, un même texte est rarement découpé en plusieurs colonnes.
Il existe cependant un ouvrage qui a tenté, à sa manière, de proposer une nouvelle approche de la lecture en exploitant l’outil Web d’une façon différente. Graphic Design in the Post-Digital Age est un ouvrage dirigé par le designer et chercheur Demian Conrad. Ce livre est le résultat de trois années de recherche menées sur lethème du code créatif ou creative coding en anglais, en collaboration avec la HEAD-Genève. Ce livre (fig.4) est composé de trois parties. La première contient une vingtaine d’interviews avec des designers phares de la communauté du creative coding, qui se servent du code comme un outil de création. La deuxième, centrale, contient les images référencées tout au long de l’ouvrage. Enfin la troisième est un regroupement de différents paragraphes provenant de la section « interviews » qui sont classés en « sessions » (par thématiques) et qui permettent de se repérer différemment dans le livre.
Ce projet de recherche est également accompagné d’un site Web22 (https://www.postdigitalgraphicdesign.com/) qui adopte une approche similaire. Sur la partie gauche de l’écran, la partie interview ; au centre, une zone qui permet de visualiser les figures référencées dans les interviews et sur la droite de l’écran, la partie « sessions » (fig.5).
Grâce à cette disposition sur l’écran, notre approche de la lecture est différente d’un article traditionnel. L’ouvrage nous propose deux façons de le lire, à gauche une lecture linéaire et chronologique de l’interview d’un designer dans une forme question / réponse, et à droite un accès par catégories. Cette partie « catégorie » permet au lecteur de chercher grâce à des mots clés les paragraphes qui parlent d’un sujet précis. De cette façon, si le lecteur est uniquement intéressé par certains thèmes, il peut grâce à cet outil voir tous les moments où un sujet est évoqué à l’échelle du livre. Par exemple, lorsque l’on sélectionne « Learning + Education > Learn Code > Students » (fig.6) cela nous permet de retrouver rapidement les passages clés sur la thématique de l’enseignement du code aux étudiants, les différents passages nous renvoient alors vers l’interview dont ils sont extraits et permettent ainsi un accès direct à l’information en question.
Ce site exploite donc les avantages que peut offrir un support Web que ce soit dans l’exploitation de l’intégralité de l’écran, dans l’affichage de contenu qui avec la possibilité d’interactivité et d’affichage responsive permet de révéler du contenu ou d’en réduire la taille (comme les menus sur les bords de l’écran qui permettent de se déplacer dans les interview ou dans les différentes « sessions », ou pour la partie centrale des « figures » qui une fois survolée avec le curseur de la souris, s’ouvre par dessus le texte pour venir occuper un bon tiers de l’écran et permettre une meilleure observation de l’iconographie.) En plus de ces fonctionnalités, le lecteur a la possibilité de « marquer » les paragraphes qui l’intéressent pour les garder en mémoire dans une fenêtre qui viendra se positionner à droite de l’écran et remplacer la section « session ». Le site permet donc une lecture active et aidée d’outils qui donnent la possibilité au lecteur d’avoir une lecture plus efficace.
Quant à la version imprimée du livre, elle tente à son niveau de proposer une lecture différente de celle qu’un lecteur a l’habitude de pratiquer. Passé outre l’utilisation du Leet Speak23 Le Leet Speak ou en leet speak : 1337 5|*34|<, est un système d'écriture utilisant des caractères ASCII d’une manière peu compréhensible pour se substituer aux caractères latins. Apparu à la fin des années 1980 dans les communautés de hackers et de geeks technophiles, il est une manière d’apporter de la créativité dans un espace ASCII limité, mais permet également aux hackers d’éviter le profilage et le repérage automatique par mots clés grâce à sa difficulté à être lu. qui peut dérouter le lecteur en première impression, le livre possède une lecture assez linéaire dans les articles, cependant il est agrémenté au fil du texte de nombreux éléments qui peuvent à première vue sembler énigmatiques, voire cryptiques. Des sortes de notes qui viennent dépasser sur le texte de labeur, des paragraphes qui apparaissent ponctuellement, rédigés dans une typographie presque illisible, l’utilisation de chevrons sur certains mots, on pourrait penser que toutes ces éléments sont purement esthétiques, comme l’utilisation du Leet speak, et sont compris dans la volonté de faire un ouvrage qui renvoie aux codes du web et de l’informatique. Mais comme l’explique bien le diagramme au début de la troisième partie du livre, tous ces éléments ont un intérêt dans la lecture. Le livre a été mis en page principalement grâce à différents processus de traitement par algorithme, et par l’utilisation de différents langages, PHP, JSON, LATEX, ce qui a permis dans un premier temps, de faire l’intégralité de la mise en page du livre « automatiquement »24 Bien que de nombreux processus ont été automatisés dans la production de la mise en page, le designer exerce toujours un contrôle sur ce que les algorithmes peuvent produire, mais qui a également permis d’incorporer dans le livre différents éléments responsive qui apparaissent ponctuellement, comme ces notes de bas de pages « generated footnotes » ou « generated glossary » rédigées par une intelligence artificielle utilisant le modèle GPT-J-6B ML. Dans la même idée, les mots clés mis en exergue dans les marges des interviews renvoient vers la troisième partie « session » qui, comme le proposait le site, trie certains paragraphes par thèmes abordés pour donner au lecteur une autre façon de lire l’ouvrage. Il est donc totalement possible d’entamer l’ouvrage par la troisième partie pour ensuite être envoyé dans la première partie à l’endroit qui nous intéresse.
Cet objet nous permet donc d’observer plusieurs choses ; premièrement, il est possible de proposer de nouvelles façons de consommer la publication sur le Web par une utilisation différente de l’espace qu’offre l’écran, autant sur support mobile que sur ordinateur, en proposant des outils au lecteur et des fonctionnalités permettant d’avoir différentes approches de la lecture d’un même contenu. Deuxièmement, le livre n’est en réalité pas hermétique à ces nouvelles propositions. Bien que sa forme physique implique inévitablement des contraintes, il est possible d’apporter de la nouveauté lors de la conception d’un ouvrage. Que ce soit via de nouveaux outils de publication plus proches du code, ou en laissant une plus grande liberté à l’ordinateur avec l’utilisation d’algorithmes, ou d’intelligences artificielles, le contenu adopte une certaine forme de variabilité. Il est ainsi possible de créer des objets qui proposent au lecteur de nouvelles façons d’aborder un ouvrage.
Avec l’évolution des technologies numériques et de la production de contenu quasiment exponentielle, les habitudes de lecture des utilisateurs ont évolué. Elles ne sont plus les mêmes sur le Web que sur la publication papier. De plus, la production de la publication de masse qui s’est développée sur le Web a poussé à créer du contenu plus condensé et moins qualitatif, comme nous avons pu le voir précédemment.
À l’inverse, la publication papier semble se différencier sur deux points de la publication Web ; premièrement par son contenu, qui semble ne pas avoir été contraint comme l’a été son équivalent sur le Web, et deuxièmement par la forme qu’adopte la publication imprimée. Quand nous parlons de forme, il faut différencier la forme visuelle qui est définie par la mise en page et les choix graphiques, et la forme physique, la matérialité du document, définie par le format, le papier ou la reliure. C’est sur cette seconde notion de forme que nous nous attarderons puisque c’est cette forme du contenant qui définit en partie la forme du contenu. Mais c’est surtout cette forme physique qui impose au lecteur de devoir prendre un temps de pause pour réellement s’impliquer dans sa lecture. De la nature de la publication (livre, journal, revue), découle tout un champ de variables qui vont créer un espace de lecture unique. Lorsqu’un lecteur lit un ouvrage papier, il connaît à l’avance la nature de ce qu’il va lire, et parfois partiellement son contenu grâce à la couverture du livre. Il peut donc déterminer son temps approximatif de lecture. De cette déduction, le lecteur va choisir où s’installer pour lire, comment s’installer, la forme et les dimensions de l’ouvrage vont aussi influencer ces choix, on ne se s’installera pas au même endroit et de la même façon si on lit un roman de poche, le journal du jour, ou un livre de design. Tout ceci pour amener au fait que la publication imprimée, de par sa matérialité a une influence directe sur notre positionnement dans l’espace, et le fait d’imposer une position nouvelle à chaque lecture permet de séparer l’activité de lecture des autres activités, créant donc un « temps de lecture » bien défini.
Là où à l’inverse, lire sur un support numérique, que ce soit sur un ordinateur, un smartphone ou une tablette, peu importe le type de publication consultée ne propose pas de rupture nette entre le temps de lecture et les autres activités que propose ce support. En effet, le support de lecture garde la même forme quel que soit le type d’activité menée ; que l’on consulte un article sur le site d’un journal, ou que l’on soit sur Twitter, notre unique action sera de scroller, avec sa souris, un pad ou avec son doigt sur son écran. Notre position physique ne sera pas affectée par le changement du contenu consulté, et il n’y aura pas de rupture, de séquençage du temps. Et c’est cette uniformité dans le temps, en particulier dans la lecture sur smartphone qui peut être répétitive dans le scroll, que le Web semble atteindre ses limites dans sa forme actuelle. Si l’on ajoute à cela l’abondance de contenu comme nous avons pu le voir avec les « gourmandises numériques », l’utilisateur se retrouve plongé dans un flux constant et uniforme qui peut rendre l’appréciation de la lecture peut être plus compliquée. Comme l’explique Claire Bélise dans Lire dans un monde numérique25 BÉLISLE Claire, Lire dans un monde numérique, Villeurbanne : Presses de l'Enssib, 2011, consulté le 6 décembre 2022. (http://books.openedition.org/pressesenssib/1081), la lecture possède une relation complice avec le temps, et dans un espace comme le Web où l’information est plus courte, mais plus dense, ce temps de lecture est plus court, plus découpé. Il ne persiste donc pas réellement ce « moment » de lecture.
Comme nous avons pu le voir, les habitudes de lecture qui sont apparues sur le Web sont différentes de ce que propose l’édition imprimée. Nous sommes alors en droit de nous demander s’il serait pertinent que l’édition imprimé s’inspire du Web pour de la production de contenu. Comme nous l’avons vu, le Web propose une lecture plus condensée, plus courte pour que le lecteur ne se lasse pas et ne quitte pas le contenu étant donné qu’il en est exposé à une grande quantité de façon permanente. Transférer cette idée de « gourmandises numériques » au papier serait-elle alors pertinente ? Là où l’imprimé avec sa capacité à « séquencer le temps » peut se permettre de proposer du contenu bien plus long et détaillé, et où les lecteurs recherchent ce « moment » de lecture qui permet d’être déconnecté du monde environnant et d’être concentré sur leur lecture. Une influence sur la façon dont le contenu est pensé n’est peut-être pas souhaitable, mais en revanche les technologies qui ont permis de développer le Web et qui ont pu être développées grâce à ce dernier pourraient amener un nouveau souffle dans la publication imprimée.
L’utilisateur est au centre du fonctionnement du Web actuel. En tant qu’acteur économique car il est une source de revenu pour de nombreuses plateformes, mais aussi comme créateur, car il produit du contenu. Pourrions-nous exploiter cette double identité dont le lecteur dispose pour imaginer de nouvelles façons de produire un document imprimé ? Donner plus de poids au lecteur dans l’aspect que pourrait prendre le document ? Cette implication pourrait être active, mais également passive, ou un document ouvert serait différent pour chaque lecteur, en se basant sur différents paramètres de son support de lecture. Serait-il possible d’utiliser les technologies du Web pour redonner aux publications une dimension unique, propre à chaque lecteur. Cette dimension unique pourrait venir donner une nouvelle valeur à la publication numérique.
Comme nous avons pu le voir, l’arrivée des logiciels WYSIWYG a créé ce que l’on pourrait qualifier de « boîtes noires » autour des outils de création. C'est-à-dire que le designer n’a pas la main à 100% sur les logiciels qu’il utilise. Ces boîtes noires sont notamment apparues dans les logiciels dit « propriétaires », car commercialisés par un éditeur, qui dans un souci de concurrence et de rentabilité, ne peut pas se permettre de diffuser son code source aux utilisateurs. L’implémentation de ces « boîtes noires » a entraîné une certaine frustration chez certains designers, qui trouvaient ne pas avoir assez de contrôle sur leur production, laissant le logiciel gérer automatiquement certains aspects de leur travail. En plus de cela, le logiciel propriétaire rend l’intégralité des outils et des fichiers de travail d’un designer dépendants d’une seule et même entité. L’exemple le plus évident pour illustrer ce cas est celui de la marque Adobe Inc. qui exerce aujourd’hui une situation de quasi-monopole sur les logiciels de création graphique et de PAO. Bien que certains usagers puissent défendre l’idée que cela permet de créer de l’interopérabilité entre les logiciels, permettant de faciliter le processus de production. Si demain, Adobe retire un de ses logiciels du marché, ou décide de ne plus desservir un pays pour diverses raisons, c’est tout un pan du monde de la création et de la production visuelle qui risque d’être immobilisé pendant un certain temps. Bien que de nombreuses solutions alternatives, gratuites ou payantes, existent, il ne faut pas ignorer cette possibilité, même si sa vraisemblance peut sembler peu probable.
C’est dans cette idée de se libérer du monopole des logiciels propriétaires que certains designers ont décidé de se mettre à utiliser des outils plus ouverts, dit « Open Source » qui permettent une plus grande transparence dans la conception du logiciel, mais aussi une plus grande liberté dans l’utilisation, notamment pour les logiciels ayant une approche plus similaire au code. Nous pouvons par exemple citer la librairie Paged.js. Cette librairie Javascript a été créée par Adams Hyde et est actuellement développée par Julie Blanc, Fred Chasen et Julien Taquet. Paged.js est considéré comme un Polyfill c'est-à-dire qu’il ajoute une fonctionnalité à un programme existant, ici un navigateur Web, qui est voué à être incorporé de façon permanente à l’avenir. Paged.js permet à des designer, de concevoir une mise en page d’un ouvrage en utilisant les langages informatiques HTML et CSS directement depuis un IDE26 Un IDE, Integrated Development Environment ou Environnement de Développement Intégré sont des logiciels de programmation optimisés pour les programmeurs avec une large sélection de langages disponibles et différents outils de test et de corrections intégrés. Beaucoup de ces logiciels sont gratuits et Open Source comme Visual Studio Code, Notepad++, Eclipse, etc.. De cette façon, le designer peut concevoir un ouvrage de A à Z sans avoir à utiliser les logiciels propriétaires traditionnellement utilisés pour cela, comme InDesign. Le designer peut profiter des avantages que permet le code, notamment du CSS, qui permet d’appliquer des styles sur l’ensemble des éléments de l’ouvrage (le texte, les titres, la position et les dimensions des images). Paged.js permet aussi d’avoir une mise en page responsive qui donne la possibilité au designer de changer son format aisément. Un autre avantage, qui est ici plus lié à la notion d’automatisation, est la possibilité de laisser la machine gérer certaines tâches d’après des algorithmes que le designer aurait défini comme pour le placement des images sur une page, ou la gestion des notes de bas de page.
Néanmoins l’utilisation de ce type d’outils reste à pondérer avec le fait que l’apprentissage de leur utilisation est plus complexe pour des designers n’étant pas habitués à l’utilisation du code dans leur processus de production. Le monde de la programmation étant un univers à part entière qui dépend de beaucoup plus de facteurs techniques que le monde du design graphique (notamment lorsqu’il est intégré dans des logiciels WYSIWYG). L’utilisation de ces outils Open Source qui ont une approche similaire au code peut donc sembler assez austère pour les designers qui voudraient se lancer dans l’apprentissage du code dans le design. Un effort de médiation serait alors peut-être nécessaire de la part de ces communautés pour rendre ces outils plus accessibles aux designers. Il en revient aussi aux designers graphiques d’échanger avec différents acteurs du monde du développement et de la programmation pour tenter de créer de nouveaux ponts entre les deux domaines.
Comme nous l’avons vu, une des façons dont l’imprimé pourrait utiliser le Web comme inspiration serait dans la manière dont ce dernier a donné une plus grande liberté aux utilisateurs dans la création et le partage de contenu. Un des principaux atouts du Web, qui peut parfois s’avérer être un défaut, est sa capacité à pouvoir transmettre de l’information rapidement et à une échelle bien supérieure à celles des canaux de diffusions classiques comme la voie postale ou la télévision. Le Web pourrait être alors investi comme lieu de partage de la publication indépendante, avec les outils que nous avons pu voir auparavant, le Web semble être le lieu parfait pour diffuser des revues, des magazines, qui sont souvent des lieux d’expérimentation graphique et qui pourraient exploiter les capacités responsives et dynamiques du Web. Ce partage de la publication n’est pas restreint au support numérique, dans cette logique de se libérer des organes de publication, il est possible d’imaginer un ouvrage partagé massivement et que chaque lecteur pourrait imprimer soi-même. Cette nouvelle façon de procéder a été tentée par un label d’édition, Objet Papier. Ce collectif composé de Ronan Deshaies, Morgane Bartoli, Juliette Bernachot et Corentin Moussard propose de nouvelles façons d’aborder l’édition papier en essayant de s’affranchir des limites de celui-ci. Un des projets produit par ce collectif, le petit magazine Print-It donne les rênes au lecteur et lui permet d’être son propre imprimeur. Exploitant les propriétés du CSS-Print, l’intégralité du magazine est contenu dans un site et permet d’être imprimé grâce à la fonction « Imprimer » présente dans tous les navigateurs. Disponible en deux versions, la première pouvait être commandée sur le site du collectif et mettait à disposition une couverture imprimée et une baguette en plastique pour la reliure. Pour obtenir son magazine, il suffisait se rendre sur le site et simplement rentrer son nom, son prénom et le numéro de notre édition (noté sur la couverture) et le site générait un PDF qu’il ne nous restait plus qu’à imprimer nous même à l’aide d’une simple imprimante A4. La dernière étape nécessite juste de plier les feuilles, d’ajouter la couverture et de les glisser dans la baguette de reliure (fig.7), et voilà, la fabrication de notre magazine était terminée ! Notre nom était crédité sur la dernière page de l’édition à côté de la mention « imprimé par », rendant par la même occasion, notre édition unique. La deuxième version, entièrement gratuite, est toujours accessible et permet à n’importe qui d’imprimer une édition, le processus est quasiment identique, l’on rentre son nom et son prénom et le site nous génère notre édition sous forme d’un PDF, il ne reste plus qu’à l’imprimer sur papier pui à relier le magazine avec des pinces ou des agrafes (fig.8).
Ce que nous pouvons retenir de ce projet, c’est qu’il est possible de diffuser des revues et des magazines à une échelle très large si les collectifs décident de se reposer uniquement sur des outils que tout le monde dispose (un ordinateur, du papier, une imprimante de bureau, et des agrafes). Il est donc possible pour de nombreux collectifs de s’émanciper du poids des organes de production traditionnels comme l’imprimeur, et de tenter de toucher différemment un nouveau public. Il est certain que ce mode de diffusion / production ne conviendra pas à tout le monde, puisqu’il impose des contraintes en termes de format, de qualité d’impression, de choix du support, sur le nombre de pages à imprimer et sur les limites du façonnage puisque ce dernier sera entièrement pensé par le lecteur. Il revient alors aux designers graphiques de s’emparer de ces contraintes et de jouer avec.
De ce que nous avons pu en observer, le Web est un espace de partage d’informations qui a su évoluer pour répondre à ses problématiques propres. Ces problématiques étant majoritairement liées à des questions de quantité de contenu et de rétention de l’information, de nouvelles façon de proposer ce contenu sont alors apparues ; contenu textuel plus court, intégration de contenu interactif, utilisation de l’hypertexte. Mais cet espace virtuel possède d’autres caractéristiques. Le Web a évolué dans une culture du libre et du partage qui a beaucoup influencé ce que l’on peut qualifier aujourd’hui de « culture Web ». Au nom de la notion d’Open Source très présente dans ces premiers espaces d’échanges, de nombreux acteurs du Web défendent cette culture du logiciel libre et du partage. Alimentée par l’anonymat allouée par le Web qui permettait le partage de contenu pirate plus facilement et par les multiples outils libres mis à disposition de tous, cette culture de l’image décomplexée et du partage libre, a également pu se développer.
Nous avons pu voir, grâce au magazine Print-It, qu’il était possible de proposer la publication imprimée au lecteur d’une nouvelle façon, lui donner plus de contrôle dans le processus de production. Mais également, nous avons vu qu’il était possible de réinvestir les façons dont le Web traite les différentes manières d’aborder un contenu, proposer des lectures alternatives comme le fait le livre Graphic Design In the Post-Digital-Age avec sa partie « catégories » qui permet d’aborder le contenu de l’édition d’une autre manière.
Il ne faut pas faire l’erreur de penser que l’imprimé ne pourrait récupérer que du Web de simples codes visuels. L’édition imprimée pourrait s’enrichir de ce dernier en s’appuyant sur cette large culture de l’Open Source et du partage libre pour proposer aux éditeurs et aux lecteurs de nouvelles façons d’aborder la publication. Permettre plus d’implication de la part du lecteur, exploiter les technologies disponibles dans cet espace virtuel pour créer de nouvelles expériences de lecture. User des nouveaux outils de production ouverts pour s’émanciper des chemins de production traditionnels. Dans une volonté d’indépendance des organes de production de l’édition actuelle, les outils que le Web a permis de développer pourraient être l’une des solutions à adopter.
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Papier : Munken Print White 15 90g.
Redaction par Forest Young & Jeremy Mickel
Palatino par Hermann Zapf
National par Kris Sowersby
CascadiaCode par Saja Typeworks pour Microsoft
Merci à toutes les personnes qui m'ont accompagnées et soutenues tout au long de ce mémoire, et tout au long de ces deux années.
Merci à Serge Denneulin et Benoit Caudoux pour m'avoir accompagné tout au long de l'écriture de ce mémoire.
Merci à Cédric Villain de m'avoir fait part de ses remarques, mais également pour ces 4 années d'enseignement et d'échanges particulièrement enrichissants.
Merci à Quentin Juhel pour ses conseils concernant la technique mise en place derrière cette édition.
Merci à mes amis et camarades ; Rémi, Jehanne, Romane, Adèle, Louise.I, Canelle, Louise.B, Camille, Jeanne, Léa et Lou,
sans qui cette année n'aurait pas été aussi agréable.
Merci à mes parents de toujours m'avoir soutenu dans mes études.
Ce mémoire est disponible en deux version ; une version Web accessible sur : www.hugo-giffard.fr/points-de-contacts et une version imprimée et reliée que vous tenez peut-être dans vos mains.
L'édition imprimée a été réalisée entièrement en HTML et CSS. La mise en page a été réalisée grâce à la librairie Javascript Paged.js [pagedjs.org]. La version Web et la version PDF sont issues du même fichier HTML d'approximativement 1300 lignes.
Vous pouvez retrouver plus de détails sur la conception de ce mémoire sur : www.hugo-giffard.fr/projet/points-de-contacts